Rosenkavalier - Stuttgart

Comme je suis un IMMENSE fan de Stefan Herheim, je file a Stuttgart pour la premiere de "Der Rosenkavalier".

Christiane Iven (Feldmarschallin)
Marina Prudenskaja (Octavian),
Mark Munkittrick (Ein Polizeikomissar),

Lars Woldt (Baron Ochs),
Mojca Erdmann (Sophie)
Michaela Schneider
(Jungfer Marianne Leitmetzerin)

Musikalische Leitung Manfred Honeck

Regie Stefan Herheim

Si j'aurais l'acces a wifi, je vous ferai demain soir le 1e rapport de ce grand evenement theatral europeen [c'est pour ca que j'ai renonce d'aller a Valence pour voir Les Troyens ]


OK, restez sages et SURTOUT ne postez pas!

On attend le CR avec impatience!

Oui, moi aussi j'attends le CR.. surtout parce que un jeune tenor roumain a fait son debut...

Ouiiii, ce sera pour demain!

Mais quel moment de bonheur!!! C'est pour des moments comme ca que j'aime opera, le theatre.
Stefan etait visiblement heureux que le public a adore son spectacle. "Adore" - c'est rien de le dire. Le 3e acte est seulement comparable a son Parsifal (que je pense etre le meilleur spectacle scenique jamais cree).

Je n'ai pas pris des photos de spectacle (les oeuvreuses sont super dures avec des gens avec les appareils photo), mais j'en ai pris qqs'unes pendant les applaudissements.

Pas de wifi a mon hotel ; en Allemagne T-Mobil monopolise le marche et si vous voulez une connection vous devez soit payer 10euros pour une heure, ou 30 euros pour une semaine! Sinon les Internet-cafes etaient tous fermes - 1/11 & le dimanche en plus. Dans le pays ou presque tout est 20-30% moins cher qu'en France, payer 10euros pour verifier le mail, franchement...

Alors, mes chers, quelques mots sur le jour de la 1ere de Der Rosenkavalier a Stuttgart.

C'est une ville agreable. Par rapport a mon dernier voyage dans cette ville (ca faisait 13 ans! Ah, on ne rajeunit pas...) la structure de la population a bcp change: on y voit bcp plus de visages asiatiques, des blacks ne sont plus du tout des raretes, un metissage est plus que visible (et plus prononce qu'a Munich, par exemple!)

Sinon c'etait le jour des Toussaints, le dimanche en plus --> ce qui tombe bien car on ne se laisse pas detourne par le shopping ; on peut voir l'autre beaute de la ville. Le Staatsoper se trouve dans le centre ville ou il y a 2 autres grands theatres, ensuite quelques galeries des arts et un vieux chateau qui d'un cote donne sur ce jardin/parc ou sont des theatres, et de l'autre sur une grandissime place du centre ville, ou se trouve la mairie et une zone pietonne degagee et tranquille. Sur cette place ils ont installe un petit patinoire, des petites cabanes ou on vend des specialites allemandes : les bieres, les wurstels, les sucreries, et bien evidemment du vin chaud - heh! Le b-mol est la musique pop allemande (c'est meme pire que la pop francaise! ), mais tout somme c'est charmant. Vous ne resistez pas a la bierre ou le vin chaud ; on vous les sert dans une belle choppe que vous payez 5 euros et vous la gardez ou la rendez afin qu'on vous restitue vos 5 euros. Donc, achetez une bierre et puis vous vous installez ou vous voulez, vous vous baladez ou vous voulez. Tres bien comme concept.


On retourne vers le parc ou sont des theatres. C'est une zone verte qui est maintenant dans toutes ses couleurs automnales, les arbres qui se refletent dans un joli etang au centre ou les canards flottent tranquilement. L'image est belle et apaisante. L'entree dans le Staatsoper est discret ; une belle foule des gens qui se sont faits baux pour la soiree de la 1ere. Le theatre est construit par les dons americains en 1946, qui ont volu que la vie normale reprennait et que le theatre similaire a celui qui a ete detruit a la fin de la guerre soit de nouveau construit. Devant l'entree une belle statue de Schiller...


Une heure avant le spectacle ils ont organise une seance pour la presse et pour les fans (dont Yours Truly) ou le dramaturge (Xavier Zuber) allait expliquer le contenu de ce spectacle, en nous offrant quelques cles pour la meilleure comprehenson. Lui c'est aussi l'auteur principal du programme (bouquin) superbement concu, qui aide vraiment pour mieux comprendre le reseau de references que Herheim allait nous offrir dans son spectacle. La couverture du programme est toute argantee avec un relief de la rose. Le programme coute 5 euros et contient les textes interessants, la perspective historique de ce changement de toutes sortes qui a ete le debut du 20e siecle. Beaucoup de photos du spectacle aussi...


La vision de Herheim est toujours troublante si vous etes plutot dans l'extremisme lyrique ou le livret doit etre respecte au pied de la lettre et que rien ne peut pas etre ajoute ou soustrait. Si vous penchez vers cette vision du theatre et de l'art lyrique, evitez Herheim en grandes circles! Herheim c'est une vision deconstructioniste du theatre et de l'opera en particulier. Parfois il va completement detruire l'oeuvre initiale (Einfuhrung a Salzbourg ou la seule chose qui etait restee c'etait la musique de Mozart; mais si vous vous laissez rentrer dans le jeu vous decouvrirez un spectacle plus que passionnant... mais ce n'est pas le Serail!). Ici, presque rien de von Hofmannsthal n'est detruit, mais le livret est serieusement trousse et revitalise. Herheim propose une vision differente, donner a cette histoire un sens qu'on nous n'a jamais presente auparavant. Le theatre dans sa plus belle forme - en ce qui me concerne.

Mais Stefan ne fait rien gratuitement. C'est un reseau des idees qui donnent un resultat coherent, clair et poignant. Il travaille comme un malade en preparant ses spectacles, etudiant chaque ligne, ne voulant jamais rester dans le "on sait que", mais il reste parfaitement fidele de l'epoque ou cette oeuvre a ete ecrite. "La fin du siecle", le monde qui change, la naissance de la psychoanalyse, le colonialisme, la fracture sociale (quelle expression!) terrible et la grogne qui est occasionnellement apaisee par quelques coups de waltzer-vienois.

Le centre de l'histoire est la Marechale, qui est assise devant le miroir et qui regarde sa reflection avec la nostalgie. Elle ne reve plus d'un prince charmant mais sa libido est polarisee vers un homme viril... C'est le moment pour faire un petit bilan et elle n'est pas contente, elle brise le miroir et se pose la question qui tue, "qu'est-ce que je suis devenue?" Et c'est la ou Octavian apparait, dans une alure mozartienne, qui se bat contre les diables-virils qui habitent la tete de la Marechale. Tout son monde [de la Marechale] change. Elle a cette nouvelle energie, son reve se melange avec la relaite, ses demons sont aussi presents que les fees.

Toute une etude de la fin du siecle vous est presentee, la decadence de la societe vienoise exhibee, et l'annonce de la 1e guerre mondiale est claire; les images de la revolution francaise sont tres presentes dans l'esprit de la societe, mais tout ca ne deraille pas de l'histoire principale. Octavian va vraiment offrir la rose argantee (que les diables ont cree en prenant les debris de la glace que la Marechalle avait brisee au debut), il va tomber amoureux de Sophie. Cette partie est magnifique car Sophie --n'oublions pas que tout se passe dans la tete de la Marechale-- represente la jeune Marechalle, innocente, une jeune reveuse...

La Marechale represente aussi une Europe vieillissante. L'histoire se passe sous la coupole qui est aussi la forme de la robe de Marie Therese. Le nombre d'idees sceniques et theatrales est epoustouflant, mais par rapport a son Lohengrin c'est beaucoup moins complique. Le travail sur les masques, les costumes, maquillage et surtout sur tout ce qui se passe sur la scene a du etre monumental. Ce n'est certainement pas le genre de spectacle que l'on peut monter en quelques jours -- meme pour une N-eme reprise.

Feldmarschallin Christiane Iven
Baron Ochs auf Lerchenau Lars Woldt
Octavian Marina Prudenskaja
Herr von Faninal Karl-Friedrich Dürr
Sophie Mojca Erdmann
Jungfer Marianne Leitmetzerin Michaela Schneider
Valzacchi Torsten Hofmann
Annina Carola Guber
Polizeikommissar / Notar Mark Munkittrick
Haushofmeister Marshallin / Haushofmeister Faninal / Wirt Heinz Göhrig
Ein Sänger Bogdan Mihai

Cenerentola, Bogdan a eu son ovation bien meritee. Mojca Erdmann est une Sophie phenomenale (elle arrive sur ma liste des hotties du monde operatique avec Isabel Leonard, Sylvia Schwartz, Miah Persson). Mais c'est Marina Prudenskaya que j'adorais le plus. C'est une voix a la Guryakova, et une presence scenique hors du commun. Elle aurait pu remplir l'immensite de la Bastille. Soulignons aussi l'acoustique extraordinaire de cette salle. J'adorais Lars Woldt. Mes voisins n'ont pas apprecie son accent faux-viennois. Qu'est-ce que c'est bien d'etre etranger dans ce genre de situations!!!
J'adorais son jeu scenique et enfin un mec qui chante le role au lieu de l'aboyer. La Marechale a eu qqs moments difficiles mais au total j'ai aime son jeu scenique, sa voix et sa volonte de tout donner. Bravissimi! Qui s'est fait un peu moins apprecie par le public c'etait Mark Munkittrick mais son intervention est tellement courte qu'on n'y prete meme pas attention.

Quelques photos, qui ne vous diront peut-etre pas grand chose, mais...

J'ai oublie de mentionner le chef, Manfred Honek, qui est le directeur musical du Staatsoper Stuttgart et depuis un bon moment aussi le chef de l'orchestre philharmonique de Philadelphie. C'etait son premier Rosenkavalier et c'etait parfois trop fort [c'est inhabituel, ca surprend mais ca ne derange pas -- enfin pas moi en tout cas ] mais c'etait une vie soufflee dans ce qui se passe sur la scene.

C'etait evident qu'un travail entre lui et Herheim a ete fait: le spectacle vibrait avec la musique et le chef adaptait des tempi de sorte que ce qui se passe sur la scene soit souligne. J'ai neanmoins repere un decalage (un seul mais il y etait bel et bien au debut du 3e acte).

Aussi au 3e acte, il y a un tic inattendu : le reve de la Marechalle est avale par la realite, le chaos s'installe, personne ne dirige plus rien; le souffleur sort de son trou et se tourne vers le chef pour demander ce qui se passe; le chef arrete la musique. Le baron Ochs auf Lerchenau maitrise la situation et c'est la guerre qui s'annonce. C'est la Marechale qui viendra au moins pour cet instant sauver le monde/spectacle en descendent du ciel, pour sauver Europe en lui offrant la rose... Apres le diable va briser la rose...

Un petit moment pour nous rappeler que le theatre c'est la vie.


Bon, 1000 excuses pour le longuissime CR, mais quand on est passionne par un spectacle...

Merci mille fois, Octavian, pour ton CR: ce n'est pas trop long.. tu nous a donne surtout l'envie de voir le spectacle ! et nous avons fait une petite excursion a Stuttgart avec toi!

Merci beaucoup. A la lecture de ton CR, on a vraiment l'impression d'y être!

Les revues sont plus que magnifiques de ce Rosenkavalier memorablissime. Apres son Parsifal a Bayreuth, c'est de loin le meilleur spectacle que j'ai vu en 2009.